09/12/2022 - Discours de Bruno Le Maire à la centrale nucléaire de Penly

9 Décembre 2022 | Discours

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Discours de Bruno Le Maire,

ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique,

 

sur la filière nucléaire française

 

 

 

 

Vendredi 9 décembre

Centrale nucléaire de Penly (Seine-Maritime)

 

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Députés,

Messieurs les Maires,

Mesdames et messieurs les salariés,

Je suis très heureux de revenir à Penly, site que je connais bien, pour lequel je me suis déjà rendu à deux reprises, pour vous exprimer en mon nom, au nom de la Première ministre et du président de la République, notre soutien total à EDF et à la filière nucléaire d'EDF.

Il n'y a qu'une seule question économique sérieuse pour le 21ème siècle : l'énergie. L’énergie est la condition de notre prospérité économique. Et l'énergie décarbonée dans un temps de changement climatique est la condition de notre survie. Pour les grandes nations développées, le défi du 21ème siècle est désormais clairement posé : produire plus d'électricité décarbonée dans les meilleurs délais possibles, dans des conditions optimales.

En France, quand on regarde ce défi, on peut s'interroger. Nous avons un atout maître : l'énergie nucléaire. Que diable sommes-nous allés critiquer cet atout maître ? Mais que diable sommes-nous allés remettre en cause, ce qui est notre atout décisif pour notre économie, pour notre compétitivité, pour la lutte contre le changement climatique au 21ème siècle ?

Avec le président de la République, nous avons donc fait un choix clair, un choix radical, un choix stratégique, pas simplement soutenir la filière nucléaire, mais offrir des perspectives à la filière nucléaire. S'engager résolument pour la construction de 6 nouveaux EPR ; s'engager résolument pour des formations, des qualifications ; s'engager résolument pour que la France reste un champion mondial en termes d'innovation sur les technologies nucléaires. Je veux dire plus simplement et avec pudeur, nous devons être fiers de notre filière nucléaire. Nous devons être fiers de faire partie des quelques rares nations sur la planète qui maîtrisent l'intégralité du cycle nucléaire, de la production jusqu'au retraitement des combustibles. Nous ne devons pas avoir honte d'être une grande nation nucléaire. Nous devons au contraire faire en sorte de réaffirmer cette position et de le réaffirmer haut et fort en ayant une stratégie claire sur la base du discours que le président de la République a prononcé à Belfort il y a quelques mois.

Le pilier majeur de cette stratégie, la pièce maîtresse, elle a un nom, 3 lettres : Electricité de France, EDF. Electricité de France, une entreprise qui a toujours été singulière dans la vie économique de la France. Electricité de France qui rassemble les meilleurs ingénieurs, les meilleurs techniciens, les meilleurs ouvriers, les meilleurs ouvriers qualifiés et spécialisés.

Electricité de France a toujours été là dans les moments de gloire de la nation française, pour accompagner son développement économique, son rattrapage économique par rapport aux autres grandes puissances, pour développer ses réseaux de transport, pour soutenir sa modernisation. Electricité de France qui a toujours été là aussi dans les moments difficiles, quand il a fallu rebâtir une grande partie de notre réseau électrique qui avait été abattu par la tempête de 1999, vous avez été là, vous avez sacrifié vos congés, vos jours de vacances, vos heures, vos nuits pour rebâtir dans des délais record l'intégralité du réseau électrique de la France. Merci.

Pendant la crise du Covid, c'est vous qui avez été en première ligne, vous les salariés d'EDF. Merci. À chaque fois qu'il y a eu une interruption, une panne, un défi à relever, vous êtes là. Merci. Et quand arrive sur nous, le problème de la corrosion sous contrainte, vous prenez le problème à bras de corps, vous vous mobilisez. Vous êtes sur le pont nuit et jour, 7/7 jours pour remettre en état les réacteurs. Merci à EDF. Merci à chacune et à chacun de ses salariés.

Je veux dire à Luc Rémont, nouveau président d'EDF, qu'il est à la tête d'une maison exceptionnelle. Et je veux dire à tous les salariés d'EDF, avec Luc Rémont : nous avons choisi le meilleur. Nous voulions le meilleur pour EDF. Nous vous avons donné le meilleur. L'Etat français, vous le savez, sera bientôt actionnaire à 100 % de l'entreprise EDF. Je pense que cette décision marque le rôle particulier d'EDF dans notre organisation économique. EDF est un service public, un grand service public. Et il n'y a pas que Sébastien Jumel qui est attaché à la notion de service public, notre majorité est attachée à la notion de service public. Servir, il n'y a rien de plus beau. Servir pour le public, il n'y a rien de plus noble. Et c'est bien pour cela qu’EDF est un grand service public qui appartiendra bientôt totalement à 100 % aux Français.

Vous pouvez comprendre aussi que les Français sont en droit d’attendre que les centrales d'EDF fonctionnent, produisent de l’électricité, et une électricité à bas coût, c’est l’objectif premier que nous nous sommes fixé. Comment avoir une EDF qui soit la plus forte possible avec l’ensemble de ses salariés rassemblés avec la même ambition, la même détermination derrière son nouveau président Luc Rémont. Pour avoir une EDF forte, il faut d’abord, pardonnez-moi cette évidence, une EDF qui produise plus d’électricité nucléaire. Il faut donc rétablir au plus vite la production du parc nucléaire français, je sais que vous vous y employer.

Je veux rassurer tous nos compatriotes, grâce au travail des salariés d’EDF. Nous sommes dans la bonne direction. Arrêtons de nous expliquer que les réacteurs sont fermés, que c’est la catastrophe, qu’on ne va pas s’en sortir, que l’hiver va être insupportable, ce n’est pas vrai et c’est faire injure à la mobilisation totale des salariés d'EDF pour remettre en route les réacteurs nucléaires qui étaient à l’arrêt, de ce point de vue là je veux saluer le retour dans le circuit électrique de 3 nouveaux réacteurs cette nuit grâce au travail des salariés.

Nous sommes dans la bonne direction, nous avons 40 réacteurs opérationnels sur 56 pour une puissance de 39 gigawatts. Notre plan de charge est clair, il ne change pas, nous voulons une production de 45 gigawatts en janvier 2023 et nous devons tout faire pour tenir cet objectif.

Par ailleurs, la mobilisation des Français, que ce soit les ménages, les entreprises, les industriels ou le secteur tertiaire, nous a également permis de réduire la consommation de 10 % au cours du mois passé. Sobriété et production sont les deux choix stratégiques qui nous permettront de passer l’hiver sans difficulté, c'est-à-dire sans coupure. Et je veux vous redire à toutes et à tous que cet objectif est à notre portée parce que vous vous êtes mobilisés, parce que nos compatriotes se sont mobilisés et que cet alliage de la sobriété et de la production doit nous permettre de passer l’hiver sans coupure.

Une EDF forte puisque vous êtes une entreprise, même si vous êtes un service public, c'est également une EDF avec des finances saines. Cela suppose, je le redis, une production nucléaire plus importante. Maud Brégeon a été salariée d'EDF et elle me disait en venant à Penly qu'elle appartenait à ce qu'on appelait la génération 420, c'est à dire de la génération qui avait comme objectif de produire 420 térawattheures. Nous sommes à 280 cette année, donc Maud Brégep, a raté sa génération. Il faut que nous revenions à une production électrique nucléaire massive pour que nous puissions restaurer aussi les finances d'EDF.

Sur la durée que je viens d'indiquer, la production électrique d'EDF a chuté de 430 térawattheures à 280, 35 % de production nucléaire perdus, 65 milliards d'euros de manque à gagner, 65 milliards. C'est l'équivalent de 8 EPR2, c'est plus que la totalité de la dette de l'entreprise. La santé financière d'EDF, c'est donc d'abord de la production électrique de masse. C'est également la restauration de la production électrique nucléaire. Plus il y aura de mégawatts, plus il y aura d'euros et mieux EDF se portera. Voilà donc la direction qui me paraît prioritaire.

Rétablir la situation financière de l'entreprise, cela suppose aussi de mieux prioriser les investissements. Il y a des besoins partout. Le grand carénage, les énergies renouvelables, les EPR2, le renforcement du réseau électrique. Il appartiendra à Luc Rémont de nous faire des propositions concrètes sur la manière de phaser et de prioriser ces investissements.

Enfin, le rétablissement des finances d'EDF, je le sais, passe aussi par certaines décisions de l'Etat. J'ai rencontré vos organisations syndicales tout à l'heure et je mesure parfaitement les sentiments pour le moins mitigés qu'avait suscité notre décision d'avoir un volume d'ARENH de 120 térawattheures cette année de façon à accompagner un certain nombre d'entreprises. Nous avons fixé le nouveau seuil à 100 térawattheures. Nous sommes revenus à 100 térawattheures par souci de ménager les finances d'EDF, et tout simplement pour tenir la parole que j'avais donnée aux salariés d'EDF que nous avions demandé un volume de 120 térawattheures.

Nous avions dit que c'était une seule fois, que nous ne le referions pas une seconde fois. Nous tenons parole avec le président de la République et nous maintenons le volume d'ARENH à 100 térawattheures. Je rappelle au passage que dès qu’EDF a eu des difficultés financières, l'Etat a toujours répondu présent en soutenant l'entreprise à hauteur de 15,6 milliards d'euros depuis 2015. Mais, je voulais solder cette question de l’ARENH qui, je le sais, a suscité beaucoup de réactions légitimes dans l'entreprise.

Enfin, une EDF forte, c'est une EDF qui a des projets industriels et qui finalise ses projets industriels dont les coûts, et dans les délais impartis. Je compte donc sur vous pour achever le plus rapidement possible les chantiers de Flamanville 3 et de Hinkley Point C, qui sont des chantiers de grande ampleur dont je mesure la complexité. Mais le respect des délais fait partie aussi de la crédibilité d'EDF.

Cette EDF forte, pilier d’autres stratégies nucléaires, est d’autant plus essentielle que nous avons, et je veux vous le dire en face, de grandes ambitions pour EDF. EDF, je le redis, n’est pas une entreprise comme les autres. Elle est un grand service public, mais elle doit aussi être un leader industriel mondial et c’est l’objectif que nous nous fixons avec le Président de la République. Qu’EDF soit le leader mondial de la production, de la distribution et de la fourniture d'électricité décarbonée. Pas un leader européen, un leader mondial, le leader mondial de la production, de la distribution et de la fourniture d'électricité décarbonée.

EDF est un champion du nucléaire. EDF est un champion des barrages hydro-électriques. EDF doit devenir demain un champion des énergies renouvelables et je veux dire là aussi, avec beaucoup de force, que ce n'est pas en produisant moins d'électricité nucléaire qu'on produira plus d'électricité renouvelable. C'est parce qu'on réussira sur le chantier du nucléaire que nous réussirons tous collectivement à produire plus d'électricité nucléaire et que nous réussirons aussi sur les chantiers des énergies renouvelables. Parce que c'est une même compétence, une même exigence, une même détermination, un même savoir-faire, une même mobilisation collective qui feront d'EDF ce que nous voulons qu'elle soit : le champion mondial de l'énergie.

À ce sujet, je veux écarter tout de suite quelques inquiétudes qui se manifestent encore ici ou là sur nos intentions, celles de l'Etat, celle du président de la République à l'égard de l'entreprise EDF. Hercule est abandonné. Que les choses soient claires. Nous avons travaillé dessus. Nous avons vu que cela ne correspondait pas aux attentes de l'entreprise. Hercule est abandonné et nous ne reviendrons pas sur Hercule. Hercule n'est pas mon sujet.

Mon sujet aujourd'hui, c'est de vous aider à être le leader mondial de l'énergie et mon deuxième sujet, c'est de transformer le marché européen de l'énergie, comme nous nous y employons avec le président de la République, avec la Première ministre Élisabeth Borne, avec la ministre chargée de l'Energie Agnès Pannier-Runacher pour avoir un marché européen de l'énergie qui soit plus performant et qui reconnaissent la valeur stratégique de l'énergie nucléaire.

Croyez-moi, ça suffit largement à notre tâche pour que nous n’ayons pas besoin de revenir sur d'autres projets. Pour qu’EDF soit ce leader, elle doit réussir deux chantiers dans le domaine nucléaire qui sont absolument essentiels.

Le premier, c'est de construire dans les délais et dans les coûts impartis 6 nouveaux réacteurs nucléaires EPR 2 avec un premier réacteur qui doit être opérationnel au plus tard en 2035 et si 2034, c'est mieux. Je mesure parfaitement le défi que cela représente. Je mesure que cela suppose de simplifier nos règles pour raccourcir les délais, améliorer la performance dans l'ingénierie, dans la construction, apprendre de nos erreurs passées, mais nous le ferons. Et il ne m'a pas échappé, même si je ne peux pas me prononcer aujourd'hui, que le site de Penly est candidat à l'accueil d'une paire de ces nouveaux réacteurs - lisez mon sourire - je n'en dis pas plus.

Le deuxième chantier, c'est le développement de ce qu'on appelle « les SMR », les réacteurs de petite et de moyenne puissances avec la construction d'un réacteur pilote que nous voulons disponible en 2030. 2030, c'est demain. Mais nous voulons accélérer sur le SMR parce que nous sommes convaincus, avec le président de la République, que ce projet représente des avantages stratégiques.

En premier lieu, ce sont des réacteurs qui sont moins coûteux parce qu'ils vont être produits en grande série.

En deuxième lieu, ils garantissent une production d'électricité proche du lieu de consommation, proche de l'industrie, proche des sites industriels, proche des grandes agglomérations. Ce qui veut dire moins d'infrastructures, moins de lignes à très haute tension et donc, en matière de respect de l'environnement, un avantage compétitif considérable.

Enfin, troisième avantage, la taille réduite des SMR en font des alternatives pour les centrales à charbon dans le monde entier. Alors, je connais la tendance nationale qui s'est accentuée depuis quelques mois, quelques années à la dévalorisation de nos talents. J'entends tous ceux qui, en général, n'ont jamais rien fait de leurs mains nous expliquer que le SMR, ça ne marchera pas, que l’EPR, ça ne fonctionne pas, que nous n'en vendrons jamais à l'étranger parce qu'ils sont trop chers, trop complexes, trop beaux, trop techniques, trop coûteux.

Mais, étant désormais un responsable politique avec une certaine ancienneté, combien de fois j'ai entendu dire que le Rafale était un avion de combat trop coûteux, impossible à exporter, trop technique, qui ne correspondait pas aux besoins à l'exportation de nos partenaires. Et aujourd'hui, c'est le meilleur avion de combat du monde vendu à plus de 280 exemplaires à l'export.

Il se passera sur nos réacteurs nucléaires EPR comme SMR, la même chose que pour le Rafale. Les mêmes qui les critiquent aujourd'hui viendront s'extasier devant leurs performances, devant vos performances demain. La politique industrielle est affaire de conviction et de volonté. Je laisse le renoncement et la capitulation à d'autres.

Pour relever ce défi, nous avons décidé, avec le président de la République, de mettre tous les atouts de notre côté et avons donc fait un choix, celui de nommer Joël Barre, ancien délégué général à l'armement, en tant que délégué interministériel au nouveau nucléaire. Je veux le remercier pour son engagement, je connais Joël depuis des années, je me porte garant de sa compétence, de sa solidité, de son enthousiasme au service de la filière nucléaire pour coordonner les différents acteurs et garantir que nous tenions nos délais et nos objectifs.

Un mot maintenant sur cette filière précisément parce que si nous voulons qu’EDF soit le champion mondial de l'énergie, si nous voulons réussir sur la construction des nouveaux réacteurs, si nous voulons rester champions en matière de nucléaire de demain et d'innovation, il faut qu'à l'échelle de la filière, nous construisions une filière compétitive et efficace. Je rappelle à tous ceux qui auraient bien aimé torpiller cette filière nucléaire qu'elle est notre troisième filière industrielle après l'aéronautique et l'automobile.

Je rappelle qu'ils représentent 220 000 emplois, des emplois qualifiés, des emplois bien rémunérés. Je rappelle qu'elle est composée de 3 000 entreprises, PME ou TPE, établies sur l'ensemble du territoire, et qui génèrent près de 50 milliards d'euros de chiffre d'affaires par an.

Comment est-ce que cette filière doit évoluer pour répondre aux défis du XXIème siècle et garantir le plan de charge des prochaines décennies ? D'abord en recrutant. Nous avons besoin de recruter de 10 000 à 15 000 personnes par an d'ici 2030. C'est donc un tournant historique. Il faut que les jeunes s’intéressent de nouveau à la filière nucléaire. Il faut que nous convainquions, nos étudiants, nos lycéens, nos bac pros de revenir vers la filière nucléaire, et nous devons consacrer tous nos efforts à la formation de ces compétences.

Nous avons lancé les bourses de l'université des métiers du nucléaire. Je serais très fier de les remettre tout à l'heure à 14 étudiants issus de deux lycéens de Dieppe, qui bénéficieront donc de bourses de 600 euros par mois.

Mais, au-delà de ces bourses, je veux dire à tous les jeunes qui cherchent aujourd'hui à s'orienter dans la vie active, tous ceux qui se demandent dans quel secteur aller, que c'est leur intérêt de se tourner vers l'industrie en général et l'industrie nucléaire en particulier, et que la réindustrialisation de notre pays passe par des compétences, des formations et l'engagement massif des jeunes vers les filières industrielles. Nous sommes prêts, de ce point de vue-là, à relever un certain nombre de défis majeurs.

Mieux adapter l'offre de qualification de la formation à la demande des entreprises dans toutes les filières industrielles. Solliciter les jeunes collégiens dès la quatrième, sans attendre la troisième pour qu'ils puissent découvrir les métiers industriels. La troisième, c'est trop tard.

J'ai eu l'occasion d'en parler avec le ministre de l’Education nationale, Pap Ndiaye, au moment des journées ouvertes sur l'industrie. Il faut que, dès la quatrième, nos jeunes puissent avoir accès à des métiers industriels.

Par ailleurs, si nous voulons réussir cette formation aux métiers industriels, il faut réussir la féminisation. Un métier où il y a peu de femmes est un métier condamné. Plus il y aura de femmes qui s'engageront dans le secteur industriel, dans l'ingénierie, plus l'industrie française sera forte. La féminisation de l'industrie est un des grands défis qui nous attend et qui fera de l'industrie un des vecteurs de notre puissance économique au XXIème siècle.

Autre défi que nous devons relever, au-delà de la formation et de la qualification, c'est l'innovation. Pour être un vrai champion mondial, il faut rester en avant dans les technologies. Cela concerne les réacteurs à sels fondus qui permettront peut-être de réduire demain le volume de déchets nucléaires. Et je rappelle que le président de la République a ouvert la voie à une coopération avec les Etats-Unis sur ce sujet lors de son déplacement à Washington. Je rappelle que nous avons également la maîtrise de l'intégralité du cycle et que l'innovation doit porter aussi sur le retraitement des déchets, c'est un des domaines français d'excellence, qui nous permet d'avoir la maîtrise de tout le cycle nucléaire. Nous pouvons et nous devons, je pense, améliorer encore nos performances, en réfléchissant par exemple à des alternatives au stockage géologique profond, nous y travaillons et nous devons continuer à y travailler.

Pour conclure ces propos, pourquoi est-ce que nous faisons ce choix du nucléaire au-delà de l'intérêt d'EDF, au-delà de l'intérêt de la nation française ? Derrière ce choix énergétique, il y a un choix économique. Celui que nous avons fait depuis près de 6 ans avec Emmanuel Macron, c'est la réindustrialisation à marche forcée de la France, qui a terriblement souffert de 30 années de délocalisations industrielles, de 30 années d'abandon des ouvriers, des ouvriers qualifiés, des ingénieurs, des salariés à qui on a expliqué que l'industrie, c'était l'histoire économique d'hier, alors que nous sommes convaincus avec le président de la République, que l'industrie, c'est l'histoire économique de demain. L'industrie nucléaire, c'est l'histoire économique de demain, et qu'il n'y a pas de nation française puissante sans industrie puissante. Et que cette réindustrialisation doit s'engager à marche forcée en améliorant la compétitivité, en baissant les impôts de production comme nous l'avons fait, en multipliant les formations, les qualifications, en mobilisant les jeunes dès la quatrième, en féminiser les métiers, en engageant les ressources nécessaires sur l'innovation, sur la recherche, sur les technologies de pointe, en montrant que oui, la France est, et restera, une grande nation industrielle.

Ce choix du nucléaire est un choix industriel et les scénarios sont très clairs. Ils ont été définis de manière limpide par RTE. Réindustrialiser la France va demander de produire beaucoup plus d'électricité, 750 térawattheures en 2050 contre 450 térawattheures aujourd'hui. Là, il va falloir les trouver ces 750 térawattheures. Vous avez le choix entre abandonner l'industrie et donc abandonner les objectifs en matière de production énergétique ou nous mobiliser totalement pour une production énergétique décarbonée massive. Et donc réussir la réindustrialisation en doublant nos capacités de production, c'est le choix stratégique que nous faisons avec le président de la République.

Il n'y a pas de grande nation industrielle sans énergie nucléaire. Ma conviction, c'est que toutes les grandes nations industrielles dans le monde, toutes les grandes nations industrielles en Europe, y compris celles qui ont fait un choix différent, reviendront un jour ou l'autre proche ou lointain à l'énergie nucléaire. Car, lorsqu’elles auront un choix à faire entre abandonner leur industrie ou relancer le nucléaire, elles relanceront le nucléaire. C'est une affaire d'années, ça ne se fera pas tout de suite. Mais je suis convaincu qu'une grande nation industrielle, quelle qu'elle soit, reviendra à l'énergie nucléaire parce que ce sera la condition pour la poursuite de son aventure industrielle.

Derrière ce choix du nucléaire, il y a aussi le choix du climat. Les scientifiques ont reconnu les choses avec là aussi beaucoup de clarté. Le nucléaire est une énergie propre, tout simplement parce qu'elle n’émet pas de CO2. Nous nous battons pour que cela soit reconnu à l'échelle européenne avec la taxonomie. Nous mènerons ce combat jusqu'au bout parce que c'est un combat scientifique, un combat de raison contre tous les idéologues qui voudraient accabler le nucléaire de tous les maux et qui nous ont fait reculer dans les années passées sur nos ambitions nucléaires. Nous voulons reprendre la main et réaffirmer, bases scientifiques à l'appui, que nous ne réussirons pas la lutte contre le réchauffement climatique sans l'appui de l'énergie décarbonée qu'est le nucléaire. Le choix du nucléaire est un choix pour le climat. Le choix du nucléaire est un choix pour l'accélération de la transition énergétique indispensable.

De ce point de vue, je le redis, nous ne laisserons jamais tomber le combat sur la taxonomie européenne. Les chiffres, là aussi, sont sans appel. C'est avec le nucléaire que nous avons une des industries les plus décarbonées du monde par rapport à nos concurrents qui utilisent le charbon et le gaz. Je vous donne les chiffres. 1 million d'euros de valeur ajoutée industrielle en France, c'est 150 tonnes de CO2 émise en France contre 250 tonnes en Allemagne, 600 tonnes dans le monde et 1 000 tonnes en Chine. La palme de la décarbonation revient donc bien à l'industrie française et elle lui revient grâce au nucléaire.

Enfin, derrière ce choix du nucléaire, il y a le choix de la compétitivité. Le prix bas de l'énergie nucléaire confère un avantage compétitif essentiel à nos industries, notamment celles qui consomment beaucoup d'énergie et qui sont exposées à la concurrence internationale. Je pense aux batteries, je pense aux semi-conducteurs, et à la métallurgie.

Beaucoup de sites industriels ne pourraient pas fonctionner en France sans l'apport compétitif de cette énergie nucléaire.

Voilà les quelques messages que je voulais vous passer aujourd'hui sur le site de Penly, en présence de votre nouveau président-directeur général, Luc Rémont, en présence de représentants des salariés d'EDF pour vous dire toute la confiance que nous avons en vous, toute la confiance que nous avons dans l'entreprise EDF et toute la confiance que nous mettons dans l'énergie nucléaire.

Pour conclure, je voudrais vous dire aussi que, derrière ce débat sur le nucléaire, il y a celui sur l'énergie dont je redis qu’elle est le grand défi économique du XXIème siècle. Il y a la question de la France que nous voulons. France doit rimer avec puissance : la puissance énergétique, la puissance nucléaire, la puissance économique. Dans le monde qui vient, aucune des autres grandes puissances ne nous fera de cadeau, ni les Etats-Unis, ni la Chine.

N’allons donc pas chercher ailleurs des modèles qui seraient meilleurs que celui que nous avons choisi depuis plusieurs décennies. Affirmons au contraire notre modèle de puissance avec nos talents, avec nos technologies, avec notre culture. De ce point de vue, le combat pour le nucléaire est aussi un combat culturel, un combat pour une certaine forme de puissance nationale, un combat pour une indépendance nationale qui nous a toujours animé depuis plusieurs décennies.

Croyez-moi, avec le président de la République, Emmanuel Macron, nous sommes prêts, et avec vous, à livrer ce combat.

Je vous remercie.