13/09/2023 - Une feuille de route franco-allemande pour l'UNION DES MARCHÉS DES CAPITAUX

13 Septembre 2023 | Communiqué de presse

1130 - Feuille de route franco-allemande pour l'UNION DES MARCHÉS DES CAPITAUX-pdf

PDF - 209.35 Ko

Le 13 septembre 2023

 

Une feuille de route franco-allemande pour l'UNION DES MARCHÉS DES CAPITAUX

 

L’investissement privé joue un rôle essentiel pour la croissance économique. La transition écologique et numérique de l'économie européenne génère d’importants besoins de capitaux privés. En améliorant les conditions de financement des entreprises de l'Union européenne, nous pouvons rendre notre économie plus résiliente, générer davantage d’emplois et contribuer à la prospérité des citoyens européens.

À cette fin, les marchés de capitaux doivent jouer un rôle plus important dans le financement des entreprises européennes. Les économies dotées de marchés de capitaux plus profonds sont plus innovantes et affichent une plus forte croissance. L'approfondissement des marchés de capitaux améliore également la disponibilité des financements à long terme.

Le programme de l'Union des marchés des capitaux (UMC) est une initiative fondamentale dans nos efforts collectifs pour promouvoir l'autonomie stratégique de l'UE dans le cadre d'une économie ouverte, de la compétition mondiale et du financement de notre économie par les marchés des capitaux. L'adoption de l'agenda UMC en 2020 a marqué une étape importante dans cette direction. Toutefois, les marchés de capitaux de l'UE disposent encore d'une marge de progression importante.

Dans des déclarations publiées dans plusieurs journaux européens en mars 2023, les présidents de 5 institutions européennes - la Commission européenne, le Conseil européen, l'Eurogroupe, la Banque centrale européenne et la Banque européenne d'investissement - ont souligné l'importance d'une Union des marchés des capitaux forte et profonde. À l'initiative du président de l'Eurogroupe, les ministres des Finances de l'UE discutent régulièrement de l'Union des marchés des capitaux lors de leurs réunions afin de fournir des orientations en vue du prochain cycle législatif. Le renforcement de l'Union des marchés de capitaux est une priorité commune à la France et à l'Allemagne. Malgré les progrès substantiels réalisés récemment dans la mise en œuvre de cet agenda, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour que l'UE commence à se rapprocher de marchés tels que ceux du Royaume-Uni ou des États-Unis, ces efforts devant se concentrer sur trois priorités de première importance :

Promouvoir la position de l'Europe en tant que hub mondial pour les services financiers : les entreprises européennes ne devraient pas avoir à se tourner vers des centres financiers non-européens pour obtenir des investissements ou des services financiers. Un secteur financier européen fort est la pierre angulaire de notre souveraineté économique, permettant à l'Europe de jouer un rôle plus fort dans la structuration du système financier mondial.

Réduire les formalités administratives : en assouplissant certaines exigences réglementaires disproportionnées, nous pouvons rendre les marchés de capitaux plus attractifs pour les investisseurs institutionnels et les investisseurs particuliers, mais également pour les entreprises européennes - en particulier les PME - à la recherche de financements.

Renforcer la culture de l'actionnariat : les marchés de capitaux offrent aux citoyens de l'UE des possibilités de placement intéressantes, mais souvent insuffisamment exploitées dans leurs décisions d'épargne. Une culture de l'actionnariat plus forte et une base d'investisseurs particuliers plus étendue peuvent aider les citoyens de l'UE à se constituer un patrimoine et à mieux préparer leur retraite.

 

Libérer le potentiel des marchés de capitaux européens dans le cadre de l'agenda actuel de l'UMC

Dans ce contexte, l'Allemagne et la France sont déterminées à se coordonner étroitement sur les dossiers relatifs à l'UMC qui font actuellement l'objet de discussions.

Une attention particulière devrait être accordée à :

 

  • Améliorer l'accès des PME et des entreprises innovantes au financement en fonds propres et au financement de marché par la dette

Les marchés publics peuvent constituer une importante source de financement supplémentaire pour les entreprises et offrir un niveau élevé de liquidité et de transparence pour les investisseurs. Cependant, les entreprises sont souvent réticentes à s'introduire en bourse : beaucoup d'entre elles manquent d'expérience en matière de financement sur les marchés des capitaux et se laissent décourager par la contrainte supplémentaire que représente le processus d'introduction en bourse et le coût des exigences additionnelles imposées aux sociétés cotées. La législation sur la cotation en bourse est une occasion unique de réduire ces barrières qui empêchent les entreprises d'accéder aux marchés publics, mieux calibrer les obligations de divulgation des entreprises publiques et moderniser les règles du marché afin de rendre le financement de marché plus efficace, y compris pour les PME. À ce titre, nous nous félicitons de l'accord trouvé au sein du Conseil pour réduire les exigences en matière de prospectus pour les introductions en bourse et les efforts de mise en conformité pour les émetteurs. Nous continuerons à nous coordonner étroitement sur ce dossier clé. Nous appelons le Parlement européen et la présidence espagnole du Conseil à viser des progrès substantiels et rapides en 2023.

Dans une prochaine étape et pour compléter l'accent mis actuellement sur les fonds propres, nous devrions étudier d'autres mesures qui pourraient être prises pour aider les petites entreprises à lever des fonds par l'intermédiaire du marché.

Nous saluons l'adoption du règlement sur le point d'accès unique européen (ESAP) qui améliorera la visibilité des entreprises européennes pour les investisseurs, y compris les investisseurs étrangers, en fournissant un accès centralisé aux informations financières et extra-financières.

 

  • Renforcer la titrisation pour financer l'économie réelle

La titrisation est un excellent outil pour la gestion des risques et de la liquidité des banques. Elle est essentielle pour permettre aux banques de fournir des crédits suffisants aux entreprises par la libération de nouvelles capacités de prêt avec l'aide du marché des capitaux. Tirant les leçons de la crise de 2008, l'UE a davantage renforcé son cadre réglementaire, mais certains déséquilibres réglementaires pourraient limiter le plein potentiel de cet outil de financement de l'économie. Dans le contexte de la révision du règlement sur les exigences en capital des banques, nos efforts ont permis d'apporter des modifications ciblées au cadre prudentiel des titrisations à court terme.

Il s'agit d'une avancée significative, mais il faut aller plus loin : nous devons également profiter de la révision encore en cours de Solvabilité II pour adopter d'autres amendements ciblés concernant les règles prudentielles relatives à la titrisation dans le cadre de ce cycle législatif. À plus long terme, une réforme de plus grande ampleur du cadre réglementaire des titrisations pourrait s'avérer nécessaire pour favoriser cet outil essentiel contribuant au financement de l'économie européenne. Dans cette perspective, la France et l'Allemagne identifieront ensemble les domaines dans lesquels des amendements sont appropriés et possibles et promouvront ces mesures auprès de la Commission et des autres parties prenantes.

 

  • Des places de marché attractives et dynamiques, une infrastructure de compensation compétitive

Nous soulignons l'importance de marchés de capitaux efficaces, liquides, transparents et résilients et resterons attentifs aux règles de négociation et aux obstacles potentiels au développement des marchés d'actions, d'obligations et de produits dérivés.

La stratégie de compensation de l'UE est un élément important pour garantir la stabilité des marchés de capitaux de l'UE et la compétitivité des infrastructures de compensation sur lesquelles nous souhaitons nous mettre d'accord dans le cadre de ce cycle législatif. Nous soulignons que la poursuite du développement de l'infrastructure de compensation de l'UE est essentielle si nous voulons accroître l'attractivité de notre secteur financier.

 

  • Améliorer les avantages pour les investisseurs particuliers

Les investisseurs particuliers doivent avoir accès à une gamme diversifiée de produits financiers pour investir et constituer leur patrimoine. Aujourd'hui, les actifs financiers des ménages sont fortement orientés vers des produits très liquides et peu rémunérateurs. La stratégie pour l’investissement de détail (Retail Investment Strategy) devrait renforcer l'accès à une allocation permettant de mieux rémunérer l'épargne des investisseurs particuliers, en garantissant une protection adéquate et des règles cohérentes, et en fournissant des informations transparentes et compréhensibles (y compris sur les coûts). En particulier, l'Allemagne et la France soutiennent la révision du règlement PRIIPs de niveau 1 afin d'améliorer la transparence et la comparabilité des produits financiers, ainsi que d'explorer les moyens permettant de garantir que les investisseurs de détail obtiennent un rendement approprié pour leurs investissements.

 

  • Finance durable

Nous devons continuer à promouvoir la finance durable en Europe et dans le monde afin de garantir que les marchés financiers contribuent aux objectifs de durabilité et gèrent les risques liés à la transition. Nous voyons un certain nombre de questions que nous devrions aborder rapidement : nous estimons qu'il est nécessaire de compléter la taxonomie de l'UE par des activités économiquement importantes liées à la transition, et qui ont été ignorées jusqu'à présent. Plus généralement, le cadre de la finance durable devrait favoriser l'allocation des flux financiers vers les efforts liés à la transition. La taxonomie européenne pourrait être étendue pour permettre d'atteindre cet objectif. Au regard des pratiques de marché actuelles pour les produits financiers, la France et l'Allemagne considèrent également que le cadre réglementaire européen actuel ne permet pas de prévenir entièrement le risque de « greenwashing » lors de la commercialisation des produits financiers. En outre, un appel à plus de clarté est justifié. La France et l'Allemagne estiment qu'une solution ne peut être trouvée qu'au niveau européen et appellent à une action rapide. De notre point de vue, des amendements au règlement SFDR aux niveaux 1 et 2 constitueraient la bonne approche pour résoudre ce problème. Par ailleurs, la France et l'Allemagne se félicitent de la présentation de la proposition de la Commission sur les notations ESG. La réglementation devrait garantir la transparence et l'intégrité des marchés financiers. Enfin, compte tenu de l'expansion rapide de la réglementation au cours des dernières années, nous devons examiner de plus près la possibilité de consolider et le cas échéant, de corriger le cadre existant - sans compromettre ses objectifs. Les différentes approches réglementaires - par exemple, en ce qui concerne les exigences en matière de planification de la transition - devraient être rationalisées.

 

  • Initiative européenne pour les scale-ups

Nous pensons qu'il est de la plus haute importance de mobiliser les capitaux privés des investisseurs à long terme, dans le but d'améliorer la compétitivité de l'économie européenne. L'initiative des champions européens de la technologie (European tech champion initiative - ETCI) est une étape importante à cet égard. Le mandat du Fonds de fonds a été approuvé par le Conseil d'administration du Fonds européen d’investissement (FEI) en novembre. Nous sommes satisfaits de ces premiers investissements. Cependant, l'ETCI ne peut être qu'une première étape. Nous devons nous assurer que nous pourrons maintenir ces scale-ups en Europe à long terme - sans soutien financier public permanent. Nous devrions donc utiliser le format de collaboration, déjà éprouvé, développé pour l'ETCI et l'excellente coopération franco-allemande au cours de l'année écoulée comme socle de travail afin de trouver et de développer une approche européenne commune en ce qui concerne les voies de sortie des actionnaires pour nos scale-ups. À court terme, l'organisation d'un atelier avec des représentants des autres partenaires contributeurs, du groupe de la Banque européenne d’investissement (BEI) et de la Commission européenne serait un bon point de départ.

 

  • Insolvabilité

Nous reconnaissons que l'harmonisation des règles sur l'insolvabilité peut contribuer de manière significative à l’Union des marchés de capitaux. Nous prenons note de la proposition de la Commission à cet effet et travaillerons de manière constructive à des solutions compatibles avec les exigences et les besoins des marchés de capitaux et des banques.

Explorer le potentiel d'une approche « bottom-up » de l'UMC

Jusqu'à présent, l’agenda de l'UMC s'est concentré sur l'harmonisation. À l'avenir, il pourrait être utile d'améliorer l'adhésion et l'appropriation au niveau national par les acteurs privés et publics, ainsi que de tenir compte de l'hétérogénéité des structures du marché des capitaux et des spécificités nationales des sources de financement dans chaque État membre.

En complément de l'agenda actuel de l'UMC à cet égard, la France et l'Allemagne suggèrent d'explorer une approche plus « bottom-up » où le partage des meilleures pratiques et l'apprentissage entre pairs pourraient être organisés afin d'encourager l'innovation nationale. Dans ce cadre, les modifications de la réglementation nationale pourraient également être présentées au niveau ministériel afin que les États membres soient tenus informés des progrès et des projets de leurs voisins en matière de développement de leurs marchés de capitaux. L'agenda réglementaire de la Commission pourrait alors en être également nourri.

Parallèlement, nous devons être en mesure d'évaluer et de suivre régulièrement, au niveau politique, l'avancement de l'agenda de l'UMC ainsi que l'effet de nos initiatives législatives sur des indicateurs clés de performance. La Commission européenne produit déjà une liste d'indicateurs qui peuvent être utilisés. Nous devrions sélectionner les plus importants et instituer un suivi régulier au niveau ministériel.

Promouvoir une réponse agile en matière de réglementation et de surveillance

Les marchés de capitaux s'adaptent rapidement à de nouvelles circonstances et doivent être accompagnés d'une réglementation réactive et agile. Cela est d'autant plus important que les juridictions voisines ont clairement manifesté leur intention d'adapter rapidement leur cadre réglementaire national afin d'être plus attractives et compétitives. Les 27 États membres de l'UE doivent élaborer une approche véritablement européenne qui favorise la compétitivité et qui puisse donner le ton au lieu de réagir, tout en préservant les avantages particuliers et le caractère inclusif de notre marché unique.

Dans ce contexte, la France et l'Allemagne souhaitent encourager la Commission à étudier les moyens d'améliorer le processus de réglementation et de surveillance des marchés de capitaux, par exemple en prenant les mesures suivantes :

  • Pour chaque texte législatif en préparation, présenter un examen des effets sur la compétitivité, par exemple en incluant des comparaisons avec des marchés étrangers très développés, en vue d'améliorer la compétitivité européenne.
  • Évaluer les possibilités de rendre la réglementation des marchés financiers plus adaptable aux évolutions rapides des marchés de capitaux, sans compromettre les pouvoirs de décision des colégislateurs.
  • Évaluer les moyens d'améliorer la base analytique du processus de prise de décision législative et de tester systématiquement l'impact potentiel des propositions législatives, sur la base d'une utilisation efficace des données, et sans accroître les exigences en matière de transmission d’information.

Poser les bases d'un nouvel agenda ambitieux pour l’union des marchés de capitaux

Au-delà de ce cycle législatif, la France et l'Allemagne appellent à un nouvel agenda de l'UMC centré sur la fourniture d'investissements privés pour l'économie de l'UE. Nous pensons que l'Europe a besoin d'idées nouvelles pour amener les marchés de capitaux de l'UE à une nouvelle étape de leur développement. La France et l'Allemagne travailleront ensemble pour s'assurer que le programme de travail actuel de l'Eurogroupe dans un format inclusif produise une liste de tâches ambitieuses et fournisse une contribution supplémentaire pour la prochaine Commission.