Déclaration conjointe des ministres franco-allemand des Finances

17 Juillet 2025 | Communiqué de presse

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Paris, le 17 juillet 2025

                                                                                                       N°771

 

COMMUNIQUE DE PRESSE

 

Déclaration conjointe des ministres franco-allemand des Finances

 

Lors d'une réunion tenue le 16 juillet à Ludwigsfelde, le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Éric Lombard, et le Vice-Chancelier de la République fédérale d'Allemagne et ministre des Finances, Lars Klingbeil ont évoqué les défis géopolitiques actuels et identifié des pistes concrètes pour renforcer l'Union européenne en matière de sécurité, d'indépendance et de compétitivité.

 

Environnement géopolitique

L'Union européenne évolue actuellement dans un environnement géopolitique particulièrement complexe et instable, tributaire en grande part de l'évolution de l'alliance transatlantique, de la guerre en cours en Ukraine et des relations avec la Chine. Sur ce point, et en lien avec la future présidence française du G7 en 2026, nous sommes convenus que l'enjeu réside dans l'analyse des causes profondes et des conséquences des déséquilibres mondiaux, ainsi que dans la recherche d'un équilibre. D'un côté, maintenir des relations économiques ouvertes, de l'autre, résoudre les tensions commerciales et favoriser des conditions de concurrence équitables. Dans ce contexte, nous sommes déterminés à renforcer la résilience de l'UE en réduisant ses dépendances et vulnérabilités critiques, par exemple en luttant contre l'afflux croissant de colis de faible valeur dans le marché unique.

Les États-Unis demeurent un partenaire clé pour l'Allemagne, la France et l'Union européenne. Nos économies ouvertes sont la base d'une croissance durable et d'une prospérité partagée de part et d'autre de l'Atlantique. Un dialogue respectueux et constant est essentiel au maintien de relations transatlantiques solides. Concernant les négociations en cours avec les États-Unis, nous continuerons à soutenir la Commission européenne dans ses efforts pour parvenir à un accord d'ici le 1er août ; parallèlement, nous sommes prêts à protéger les intérêts de l'UE par des contre-mesures proportionnées. S'agissant de l'Ukraine, nous avons réaffirmé notre soutien indéfectible à ce pays dans la défense de son intégrité territoriale, de sa souveraineté et de sa liberté. Depuis l'invasion illégale, et non provoquée, par la Russie en 2022, les Ukrainiens font preuve d'une détermination remarquable. Nous restons résolus à soutenir l'Ukraine dans son combat et à contribuer à l'émergence d'une paix globale, juste et durable.

 

Renforcer la souveraineté, l'indépendance et la sécurité

Dans ce nouveau contexte géopolitique exigeant, il est impératif que l'Union européenne renforce sa souveraineté, son indépendance et sa sécurité. Les Européens ne peuvent plus se permettre de dépendre aussi largement de la protection de partenaires extérieurs. Face aux menaces hybrides, aux dépendances énergétiques, aux pressions économiques extérieures et aux défis sécuritaires croissants, nous sommes convaincus que bâtir une Union européenne plus autonome et plus résiliente est déterminant. Non seulement pour défendre nos valeurs partagées et nos intérêts stratégiques, mais aussi pour préserver la stabilité de nos institutions démocratiques. Nous sommes convaincus que le renforcement de la souveraineté européenne passe par une augmentation des investissements dans des domaines stratégiques, tout en respectant les règles budgétaires de l'UE et en veillant à la soutenabilité des finances publiques. Nous partageons la conviction qu'une augmentation de nos dépenses de défense est indispensable, tout en veillant à leur efficacité, en favorisant la standardisation, l'interopérabilité et une coopération multilatérale accrue dans la planification et l'acquisition de capacités militaires.

À cet égard, nous entendons promouvoir des projets soutenant les start-up et l'innovation, avec une double finalité, au bénéfice de la base industrielle et technologique de défense européenne. Nous sommes convenu d'un échange de vues quant aux ambitions d'une meilleure dépense commune en matière de défense. Enfin, nous soutenons le projet d'euro numérique, initiative essentielle pour la souveraineté européenne. Reposant sur un cadre institutionnel solide, l'euro numérique doit garantir aux Européens la possibilité d'utiliser l'euro en espèces comme en version numérique, tout en assurant un haut niveau de protection de la vie privée. Un modèle de rémunération équitable, des mécanismes solides de stabilité financière et une bonne accessibilité pour les entreprises devront être garantis. Enfin, nous reconnaissons le potentiel des projets de règlement des transactions de gros en monnaie de banque centrale et saluons leur mise en œuvre rapide, qui contribuera à renforcer le rôle international de l'euro.

 

Renforcer la compétitivité

L'Europe doit renforcer sa compétitivité si elle veut préserver son indépendance et sa souveraineté, tout en continuant à offrir un cadre de vie de qualité à ses citoyens, comme le soulignent les rapports sur la compétitivité de l'UE (Mario Draghi) et sur le marché unique (Enrico Letta). Le marché unique est notre levier le plus puissant pour assurer une croissance durable et une prospérité de long terme. Des avancées rapides sont nécessaires pour son approfondissement. Nous saluons donc la stratégie de la Commission européenne pour le marché unique, qui propose un ensemble de mesures dans des domaines clés pour un marché modernisé et digitalisé. Le renforcement de la croissance et de la productivité nécessitera également un environnement réglementaire européen moins complexe. La Commission européenne a annoncé son ambition de réduire d'au moins 25 % les charges déclaratives pour toutes les entreprises, et de 35 % pour les PME. Nous soutenons fermement cette démarche de simplification et exhortons la Commission à identifier d'autres potentiels de simplification au-delà du reporting, notamment dans la réglementation des marchés financiers, tout en limitant les effets indirects sur les petites entreprises de l'économie réelle. Nous sommes pleinement engagés dans la construction d'une véritable Union de l'épargne et de l'investissement. Le label « Finance Europe » constitue un premier projet concret que nous avons lancé avec d'autres États membres dans cette perspective de mobilisation effective de l'épargne européenne.

Par ailleurs, pour que les start-up et scale-up européennes puissent accéder aux financements nécessaires à leur développement et à l'innovation, il est crucial d'identifier et de lever les obstacles restants. À cette fin, nous avons mandaté un groupe de travail conjoint, dirigé par l'ancien ministre allemand des Finances Jörg Kukies et l'ancien gouverneur de la Banque de France Christian Noyer. Étant donné le rôle clé de la titrisation comme pont entre les banques et les marchés de capitaux, nous nous félicitons de la proposition globale de la Commission visant à revoir le cadre réglementaire européen en la matière. Nous sommes déterminés à faire avancer rapidement le processus législatif, en adaptant de manière appropriée les exigences prudentielles bancaires et assurantielles.

Concernant le secteur bancaire, nous saluons l'annonce de la Commission de conduire une analyse de la compétitivité du secteur bancaire européen, et l'encourageons à proposer des mesures ambitieuses de simplification du cadre juridique applicable à toutes les banques, en insistant sur la proportionnalité et l'égalité des conditions de concurrence au niveau mondial. Par ailleurs, nous reconnaissons la nécessité d'assurer la convergence des pratiques de supervision et de renforcer les conditions permettant aux autorités européennes de surveillance d'exercer un contrôle effectif sur les acteurs transfrontaliers les plus systémiques des marchés de capitaux et marchés financiers. Enfin, dans l'intérêt de l'innovation et de la digitalisation, nous nous engageons à faire avancer concrètement les travaux sur la finance ouverte.

 

Moderniser le cadre financier pluriannuel (CFP)

Concernant le prochain cadre financier pluriannuel (CFP), nous plaidons résolument pour sa modernisation. Le CFP doit prioriser les dépenses à forte valeur ajoutée européenne, notamment les investissements tournés vers l'avenir, l'innovation et la transformation, ainsi que le financement des biens publics européens et la défense des intérêts géopolitiques de l'UE. Parallèlement, les contributions des États membres doivent rester soutenables à long terme, prévisibles et proportionnées. Dans un contexte où la marge de manœuvre budgétaire des États membres restera limitée, l'introduction de véritables ressources propres devrait être envisagée pour soulager les budgets nationaux. Enfin, nous réaffirmons notre coopération de longue date en matière de fiscalité internationale et notre engagement commun à faire progresser la réforme fiscale mondiale à travers l'OCDE et le Cadre inclusif, dans le but de favoriser une concurrence loyale et de lutter contre les pratiques fiscales dommageables.

 

Contacts presse :

Cabinet d'Eric Lombard : 01 53 18 41 20 - presse.mefsin@cabinets.finances.gouv.fr

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